De recours en justice en recompte mouvementé, l’élection du quarante-troisième président des Etats-Unis a laissé une impression d’inachevé. Avec finalement une question aujourd’hui capitale : et si George W. Bush était le mal élu ?
L’hypothèse n’est pas farfelue. D’ailleurs jusqu’au 11 septembre 2001, une partie importante de la population américaine, via sondage, ne reconnaissait pas la légitimité du Texan. L’effondrement des Twins Towers, l’attentat contre le Pentagone ont permis à Bush Jr de s’asseoir enfin dans un fauteuil que certains voyaient trop grand pour lui. Si la guerre contre le terrorisme a relégué la véritable issue du scrutin de Floride dans les oubliettes de l’Histoire, il est bon, alors que Bush se position en gendarme du monde, de rouvrir le dossier. Et d’y découvrir qu’au moins deux éléments prouvent que le Président des Etats-Unis n’est pas le bon.
- L’étude du NORC
Au lendemain de la décision controversée de la Cour Suprême de suspendre toute procédure de recompte et de valider la victoire de George Bush, un consortium de médias américains a commandé une étude au National Opinion Research Center. Pendant un an et pour 900 000 dollars, le NORC a étudié 175 010 bulletins de vote rejeté de façon erronée par les machines de vote. Une procédure à même de faire pencher de manière définitive et incontestable la balance d’un côté ou de l’autre des deux candidats. Mais voilà, l’étude du NORC est passée complètement inaperçue. Tout cela parce que la date de publication des conclusions était prévue pour le 12 septembre 2001. Les événements de la veille ont tout d’abord reporté la date de publication puis mis les responsables des médias devant un choix difficile : parler à nouveau de la Floride n’est-il pas anti-patriotique alors que l’Amérique est sous le choc ? Résultat, après la décision de supprimer l’étude, ses résultats sont parus en catimini et de manière erronée. En effet, les quelques brèves dépêches citant les travaux du NORC ont toutes titrées sur une victoire confirmée de George W.Bush. L’honneur était sauf.
Mais la réalité est toute autre. L’étude du NORC, que l’institut, embarrassé, ne propose même pas sur son site internet, prouve que Al Gore est le véritable vainqueur.
En effet, si les résultats officiels donnent une avance de 537 voix au Texan, l’étude du NORC démontre que dans le pire des cas, grâce à l’apport de ses bulletins rejetés de manière abusive, Gore refait son retard et détient en réalité un avantage de 107 voix. Une victoire étriquée mais qui lui permet, si la procédure du scrutin de Floride avait été respectée, d’emporté l’Etat et donc la présidence des Etats-Unis.
- La plainte du NAACP
Autre élément à charge, la plainte déposée dès le 8 novembre 2000 par la NAACP auprès du Département de la Justice. La NAACP est l’association en charge de l’avance des droits des minorités. Si dans les années soixante, le groupe s’est battu pour la fin de la ségrégation dans les Etats du Sud, elle continue aujourd’hui à se montrer vigilante sur la manière dont se déroule les scrutins. Et c’est ainsi que, comme l’écrit son Président, “ la NAACP est inquiète de la manière semble-t-il abusive de disqualifications d’électeurs de Noirs et de la disparition pure et simple d’une urne d’un bureau de vote où la population est massivement noire”. La missive de Kwessi Mfume si elle ne peut pas remettre en cause la décision de la Cour Suprême a obligé la US Commission on Civil Rights à mener durant l’été 2001 une enquête sur le déroulement du scrutin de Floride. Et si, une nouvelle fois, les conclusions de Mary France Berry, sa représentante sont passées inaperçues, elles sont sans équivoque sur la véritable issue de l’élection : “ Notre rapport conclu que de nombreux électeurs de Floride ont été privés illégalement de leur droit de vote, que cette injustice a frappé principalement la population Afro-Américaine.(...) Et ainsi des Américains, qui souhaitaient voter, qui avaient le droit de vote, se sont retrouvés dans l’impossibilité de le faire.”. Les trouvailles de la commission s’étalant sur neuf chapitres démontrent non seulement le caractère massif de cette fraude mais ces conséquences directes sur l’issue du scrutin. En effet, l’électorat Noir, historiquement proche du Parti Démocrate, a voté massivement pour Al Gore. Sur certains bureaux de vote où les listes électorales ont été expurgés illégalement d’inscrits valides, les résultats démontrent un soutien à Gore dépassant les 85%. En interdisant de manière abusive des milliers d’électeurs Noirs de voter, Jeb Bush, le Gouverneur de Floride a privé le camp démocrate d’une avance déterminante. Et a ainsi favorisé la victoire de son grand frère.
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